Avec Hubert Falco, sénateur-maire de Toulon, et plusieurs élus seynois, nous avons répondu ce lundi à l'invitation de Messieurs le Préfet du Var et le Directeur de la Sécurité Publique du Var de rendre visite, au commissariat de La Beaucaire, à Toulon, à la nouvelle "Brigade Spécialisée de Terrain" de la police nationale qui intervient sur une partie des quartiers toulonnais et seynois d'habitat social (seul le quartier Berthe est concerné pour La Seyne).
Une occasion de faire connaître mon sentiment sur la police de proximité...
"Mon hésitation à être des vôtres aujourd’hui n’aura pas duré dix secondes. Ceux qui me connaissent savent quelle haute idée j’ai du rôle d’un élu de la République.
"Pourtant, ces mêmes qui me connaissent savent combien est réelle mon inquiétude quant à certaines dispositions d’aujourd’hui en matière de sécurité publique, de justice, et du rôle du maire dans tout cela.
"Cette inquiétude est à la hauteur de celle que j’ai quant à nos capacités publiques de freiner la délinquance et de combattre les sentiments d’insécurité de mes concitoyens.
"Je préfère le dire tout de go. Je suis dubitatif sur la pertinence du dispositif qui est mis en place depuis quelques semaines, mais je suis convaincu de la nécessité de redoubler d’efforts.
"Et, quelle qu’elle soit, cette Brigade Spécialisée de Terrain fait partie de ces efforts. Ne serait-ce que parce que, pour mes concitoyens les plus humbles, qui se font parfois insulter ou menacer dans des halls d’immeubles, qui ont peur de sortir de chez eux, qui craignent par peur de représailles de réprimander les auteurs d’incivilités, parfois très jeunes, pour ces Seynois-là, voir dans leur environnement immédiat une présence de policiers nationaux en tenue est une absolue nécessité.
"Je suis dubitatif, car, malgré des annonces récurrentes de nouveaux outils, tous les indicateurs qui concernent la délinquance du quotidien s’aggravent : hausse des cambriolages contre les particuliers, hausse des vols dans les lieux publics, hausse des atteintes à l’intégrité physique. Depuis 2004, ces dernières ont bondi de 16 %.
"Dubitatif, car les policiers et les gendarmes sont toujours moins nombreux ; depuis 2007, M. Hortefeux a supprimé 10.792 emplois. 2.882 postes sont détruits dans le seul budget de 2011... ce budget qui consacre une diminution de l’investissement de 6,5% pour la gendarmerie nationale et de 28,3% pour la police nationale... alors même que les conditions de travail des fonctionnaires de police et de gendarmerie sont déjà très difficiles. Et j’espère que les 14 policiers de notre BST ne sont pas prélevés sur des moyens déjà existants !
"Dubitatif aussi, parce que je ne crois pas que la seule répression soit la réponse la mieux adaptée. Je crois au travail partenarial des acteurs de la prévention, naturelle comme spécialisée, du tissu associatif, de l’École, des transports publics, de la police municipale, de la police nationale, de la Justice, notamment au sein de notre Conseil seynois de Sécurité et de Prévention de la Délinquance, dont chacun vante autant le travail de fond que la réactivité lorsqu’elle s’avère nécessaire.
"Ce n’est pas là, vous le savez, une vision dogmatique d’un élu de gauche. C’est bien un député de la majorité, M. Benisti, qui a indiqué il y a quelques jours au Premier Ministre qu’il faut « refuser une logique du tout sécuritaire qui s’est avérée inefficace » et qui a ajouté « Il n’y a pas de secret. La solution pour éradiquer la délinquance, c’est d’élaborer une vraie politique de prévention sur le terrain avec tous ses acteurs », autour du « chef d’orchestre » qu’est le maire.
"Oui, chacun doit pouvoir agir à sa place, en fonction des missions qui sont les siennes, sans empiéter sur les compétences des autres, mais avec les moyens de la complémentarité, les moyens de l’échange dans le respect de la déontologie de chaque métier, et les moyens de l’exercice central de son travail.
"Et ça ne me dérange pas qu’un dispositif un peu « musclé » prenne sa place dans une mosaïque d’interventions multiples et équilibrées, depuis la prévention jusqu’à la répression.
"Mais je suis dubitatif, tout de même, car ça ne marche que si cet équilibre des missions est garanti. Or les moyens de la prévention spécialisée baissent, avec 5 Équivalents Temps Plein perdus en deux ans à La Seyne. Les moyens de l’École et de la formation professionnelle régressent. Les moyens des associations et des entreprises d’insertion diminuent, avec 3 d’entre elles, et non des moindres, qui ont dû mettre la clef sous la porte en deux ans dans ma ville. Et les moyens de ma commune ne me laissent pas la marge de manœuvre nécessaire pour soutenir suffisamment les actions de l’éducation et de la prévention.
"Nous le savons tous, les économies du court terme génèrent parfois de grosses dépenses à long terme et, surtout, ont un effet ravageur sur le tissu social et la construction d’une société juste et solidaire. Et c’est là qu’est le terreau de la délinquance.
"Dubitatif, enfin, vis à vis d’une stigmatisation accentuée de certains quartiers. Pour ce qui est de Berthe, je ne voudrais pas que le message délivré à mes citoyens qui vivent ce quartier renforce leurs sentiments d’être des bêtes curieuses ou des cobayes d’un espace urbain délité, ce qui les dévaloriserait encore plus.
"Nous effectuons aujourd’hui, avec notre Office d’HLM « Terres du Sud Habitat » et l’aide de l’État et des collectivités, un énorme travail de rénovation et d’amélioration de la qualité de vie et des relations entre les gens. Nous travaillons sur le sentiment d’appartenance des résidents à la ville toute entière. Il ne faudrait pas que de ce dispositif vienne réinstaller des frontières dans le ressenti de nos habitants.
"Vous le voyez, j’ai bien des raisons de douter. Mais, comme je le suis lorsque j’implique à fond La Seyne dans les instances de pilotage des « nouveaux pouvoirs du maire », avec la Police et la Justice notamment, comme je le suis en ayant relancé, après l’avoir dépoussiérée, la convention qui lie notre police municipale à la police nationale, je suis disposé à m’investir totalement dans le suivi de ce nouveau dispositif. Et je serai notamment attentif, au terme de la première année, à son évaluation, telle que l’a prévue la Loi, souhaitant que notre CLSPD y soit pleinement associé.
"Donc, tous mes vœux de réussite vont aux policières et policiers volontaires qui ont cette mission à accomplir.
"Les résidents de nos quartiers populaires sont toujours demandeurs d’une présence visible des policiers. Je sais qu’ils l’accueillent bien, à la hauteur de l’engagement républicain de ces fonctionnaires, car, au fond, leur mission s’inscrit dans le cadre d’un objectif majeur fixé par le préambule de la Constitution de la France : « assurer l'égalité devant la loi de tous les citoyens »."